Le soleil chauffe bien aujourd’hui

Monsieur le Gendarme est en courses

Il se hâte sur ses six petites pattes

Glisse sous les herbes courbées

Et se faufile entre les mottes de terre sèche

Que cherche-t-il

Peut-être ces pâquerettes

Fleuries sous le tilleul

Ou bien ces myosotis

Qui penchent doucement bleutés

Mais il est fatigué

Et s’arrête tout de bon

Sous une feuille verte

Camouflant quelque temps sa cuirasse

Écarlate avec des dessins noirs

Un gros oiseau

À contre-jour

S’acharne

Sur de toutes petites branches

De cerisier

Ce n’est pas un pigeon

Il n’est pas assez gras

Et puis il n’y a pas de cerises

C’est l’hiver

Ce n’est pas une pie

Sa queue est trop courte

Et il paraît bien noir

Noir comme cirage

Avec un bec solide

Mais on dirait qu’il mange

Les branchettes

Il saute

De l’une à l’autre

En les attrapant

Dans son bec

Et semble les mâcher

Tout s’éclaire soudain :

Ce n’est qu’une corneille

Qui fait provision de brindilles

Pour construire son nid !

Quel courage…

Oui, le printemps approche.

En ces temps perturbés

Le ciel est résolument bleu

Et toutes les fleurs sont jaunes

Le monde change

Dit l'un

Le monde ne change pas 

 Dit l'autre

Qui a raison

Un doigt

Deux doigts

Trois doigts

La même main

Plus on approche

Plus on croit voir changer

Plus on recule

Plus on perçoit la permanence

Des réactions des cycles

Et si l’on plonge dans l’infiniment petit

Encore la permanence

Des mêmes fonctionnements

Seules les formes changent

Comme des feux follets

Mais la Vie

Reste toujours la Vie

Un mystère

Une aventure

Un tour de manège

Parfois grisant

Et parfois terrifiant

Le téléphone sonne

Une petite voix flûtée se fait entendre

« Bonne fête ! »

C’est le plus jeune

Il roule dans la voiture de sa tante

Vers une ville voisine

Où l’on trouve des gâteaux

Puis l’autre téléphone

Se réveille à son tour

Sollicité d’un autre numéro

La voix est plus virile

Mais le ton aussi frais

Le cadet grand ado

Annonce tout heureux

Qu’il s’est fait une copine

Au sein de son lycée !

Vont-ils tous appeler ?

En tous cas c’est très gai

La fête des Grands-mères