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             Lorsque nous étions enfants, mon frère et moi, nos parents nous emmenaient passer chaque vacance d'été du côté de Paimpol dans les Côtes d'Armor. Ils n'avaient à l'époque qu'une 2CV mais adoraient se promener aux alentours pour visiter notamment toutes les chapelles ou hauts lieux de la culture bretonne (manoirs et paysages, ports et hautes croix, pointes et vallées...) Nous suivions ces balades à l'arrière et mon père, passionné de tradition celtique, avait toujours de belles histoires à évoquer pour nous faire rêver.

            Ainsi, lorsque nous approchions du Pont de Lézardrieux sur le Trieux, une chapelle apparaissait sur un monticule à proximité de la route (une petite route : peut-être la chapelle de Kergrist ? En tous cas à l'époque les environs étaient déserts). C'est là que mon père nous racontait ce conte de Noël qui nous faisait frissonner d'effroi.

     

       « Un soir il y a bien longtemps, un pauvre homme se hâtait sur la route pour rentrer chez lui à Lézardrieux où l'attendait son épouse. Il avait eu à faire à Paimpol et regrettait d'avoir été tant retardé, car c'était le 24 décembre et il faisait bien noir et bien humide, le vent était glacial et déjà minuit approchait.

          Soudain, une chapelle sur le bord de la route attira son attention : elle était tout illuminée !

         - C'est incroyable se dit-il, il n'y a personne par ici ; la chapelle est abandonnée... Je n'y ai jamais rencontré personne. Allons voir ce qu'il se passe.

           Et le voici qui gravit le petit tertre et pousse la grosse porte de la chapelle. Quelle surprise ! Elle est pleine de monde, et chauffée ! La messe de minuit va juste commencer. Notre voyageur, simple certes mais bon chrétien, ne peut abandonner un office aussi généreux qu'inattendu.

             Il décide donc d'assister à cette messe où les participants, plutôt tristes mais appliqués, écoutent avec attention les paroles d'un prêtre plein de ferveur. Il prie pour sa famille, pour son épouse, pour que la pêche lui rapporte suffisamment et met tout son cœur dans la louange du petit Dieu qui vient de naître.

               Voici qu'arrive le moment de la communion.

               Le prêtre s'avance en présentant l'hostie et demande qui veut recevoir "le corps du Christ". Mais personne ne bouge. Le prêtre insiste et notre homme, interloqué, ne voit pas un visage remuer dans l'assistance. Prenant alors son courage à deux mains, depuis le fond de l'église il se lance dans l'allée centrale en disant :

           - Je suis un pécheur, je ne me suis pas confessé depuis longtemps, mais enfin, je ne vais pas vous laisser seul avec votre hostie sans l'honorer ! Et il reçut la communion des mains du prêtre.

              À cet instant précis, tout s'éteignit. Stupéfait, il se retrouva seul au milieu de la lande ténébreuse, auprès de la route au bout de laquelle brillaient au loin les lumières de Lézardrieux.

              Un doux chant se fit entendre :

              - Merci ! Merci ! Grâce à vous nous sommes sauvés... Il suffisait que quelqu'un accepte de communier ici la nuit de Noël, et voici des siècles que nous vous attendions...

               L'homme rentra chez lui tout heureux et vit ensuite ses affaires prospérer.

     

     

            Je ne sais pas d'où vient ce conte ni si mon père l'avait modifié ou si moi-même je m'en souviens correctement. Mais il m'a marquée, et je suis heureuse d'en partager avec vous le souvenir.

     

    Chapelle de Kerners en Arzon

    Chapelle de Kerners en Arzon (Photo du net)

     

     


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            Le désert, lieu privilégié pour plonger en soi-même et découvrir la Source qui y jaillit... Antoine de Saint-Exupéry en parle si bien, Charles de Foucauld s'y est retiré, et c'est là dit-on que Jésus trouva la force d'entamer sa mission.

           Je cite aujourd'hui Julie Ann, cette québécoise au cœur débordant d'amour qui nous invite à la suivre vers l'accomplissement suprême. En voyage à travers l’Égypte, voici le texte qu'elle publiait récemment sur facebook, accompagné d'une photo dont elle est sans doute l'auteur :

     

    « Le désert révèle le Silence
    Et le Silence soulève le désert
    Un désert vivant et vibrant
    Fort et embrasant
    Rappelant la force inépuisable de la Vie
    Dans ce souffle divin nous appelant à observer l’infini
    Un désert embrassant toute illusion de séparation
    Unifiant tout horizon
    Rappelant à l’unique Maintenant
    Ce Maintenant transcendant le temps
    où tout peut être vu et vécu
    sans que rien ne soit à juger ou à rejeter
    Ce contenant observant toutes émotions, toutes sensations, toutes perceptions, toutes pensées, toutes idées pour les laisser s’exprimer et les laisser traverser
    Le désert invite au dépouillement
    Celui de devoir se dépouiller en premier
    Car lorsque vous observez
    Il n’y a que la Vie elle-même qui ne fait que pulser
    Dans le fait de pouvoir se déposer
    De ne plus se tendre vers une réalité désirée
    La conscience peut se reposer de toute notion enregistrée
    Alors peut être simplement constaté toute la beauté déployée dans son entièreté sans être divisée
    Pour nous rappeler à la pure Lumière d’Unité que l’On Est »

    Julie Ann
     

    Le désert-photo Julie Ann

     

     


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           C'est souvent par la musique que j'ai découvert les plus beaux poèmes.

            Ainsi ce texte superbe de Paul Éluard, mis en musique avec d'autres sous le titre de "La Fraîcheur et le Feu" par Francis Poulenc - mais qu'on apprécie mieux en le lisant même si l'interprétation en est magnifique, parce que le texte n'est pas toujours parfaitement intelligible quand il est chanté.

             Écrit en 1938, il évoque la tombée de la nuit sur Paris et l'ouverture de l'âme à l'infini.

     

    Tout disparut même les toits même le ciel
    Même l'ombre tombée des branches
    Sur les cimes des mousses tendres
    Mêmes les mots et les regards bien accordés

    Sœurs miroitières de mes larmes
    Les étoiles brillaient autour de ma fenêtre
    Et mes yeux refermant leurs ailes pour la nuit
    Vivaient d'un univers sans bornes.

     Écouter ici la musique de Francis Poulenc


           La fin n'est pas sans me rappeler celle d'un poème du romantique allemand Eichendorff, lui aussi découvert par sa mise en musique par Robert Schumann : "Mondnacht" (Clair de lune). Écrit en 1835 et évoquant la tombée de la nuit sur la campagne au contraire, il montre lui aussi l'âme s'ouvrant à l'infini.

     

           Texte original                                                       Traduction

    « Es war, als hätt’ der Himmel                           « C'était comme si le ciel avait
    Die Erde still geküßt,                                        Embrassé la Terre silencieusement,
    Daß sie im Blütenschimmer                               De sorte que, dans la lueur des fleurs,
    Von ihm nun träumen müßt’.                             Elle dût désormais rêver de lui.

    Die Luft ging durch die Felder,                          La brise allait à travers champs,
    Die Ähren wogten sacht,                                   Les épis ondulaient doucement,
    Es rauschten leis die Wälder,                             Les bois frémissaient faiblement,
    So sternklar war die Nacht.                              Tant la nuit était illuminée d'étoiles.

    Und meine Seele spannte                                   Et mon âme étendit
    Weit ihre Flügel aus,                                          Largement ses ailes,
    Flog durch die stillen Lande,                              S'envola par les campagnes silencieuses,
    Als flöge sie nach Haus. »                                   Comme si elle rentrait chez elle. »

     Traduction trouvée sur Wikipedia

     

               Ou celle d'un autre poème allemand, daté celui-là de 1911 et dû à Hermann Hesse, mis cette fois en musique par Richard Strauss avec d'immenses volutes évoquant l'envol de l'âme à travers la nuit (le 3e de ses "Quatre derniers lieder", à écouter ici).

     

         BEIM SCHLAFENGEHEN                                   AU MOMENT D'ALLER DORMIR 

    «Nun der Tag mich müd gemacht,                          Las à présent de ma journée,
    soll mein sehnliches Verlangen                              J’accueille, en mon désir ardent,
    freundlich die gestirnte Nacht                               En ami la nuit constellée,
    wie ein müdes Kind empfangen.                            Pareil au las petit enfant.


    Hände, laßt von allem Tun,                                  Mains, délaissez ce que vous faites,
    Stirn, vergiß du alles Denken,                              Cervelle, cesse de penser :
    alle meine Sinne nun                                           Tous mes sens à présent souhaitent
    wollen sich in Schlummer senken.                        Dans le sommeil de se plonger.


    Und die Seele unbewacht                                    Et l’âme ainsi qui se délivre,
    will in freien Flügen schweben,                           À tire d’aile, librement,
    um im Zauberkreis der Nacht                              Part dans la nuit magique vivre
    tief und tausendfach zu leben.                            Mille fois plus et pleinement.»

    Traduction française de Lionel-Édouard Martin

     

           Finalement, s'agit-il vraiment de romantisme ? Ou n'est-ce pas plutôt l'apanage du poète, que de connaître et ressentir plus que tout autre le foisonnement infini de la Grande Vie de l'Univers ?

     

     

     

     


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    Source-image Science & Vie

     

              Dans "La Source que je cherche", Lytta Basset étend plus que jamais la spiritualité jusqu'à l'universel et en vient, à la fin du second chapitre intitulé "Nourrir la quête", à donner une interprétation plus vaste et plus profonde aux paroles utilisées par Jésus dans la prière qu'Il nous a confiée. 

           Voici ce passage, sur lequel vous pourrez me confier en commentaire votre impression.

    «  J'ai tendance à penser que c'est une quête universelle. Pour deux raisons : Jésus lui-même avait vu venir le temps où nous n'irions plus à la rencontre de Dieu exclusivement dans des lieux religieux [...]. Nous deviendrions sensibles à cette source de toute vie que lui-même appelait le "Père". Nous commencerions à L'entendre nous chercher à mesure que nous vivrions "dans un souffle et dans la vérité" [Jean 4,23] : dans l'authenticité et dans le refus de nous figer seuls avec nous-mêmes.
         Quête universelle, deuxièmement, parce que le "Notre Père" - la seule prière que Jésus ait laissée à ses disciples, à leur demande - pourrait convenir à n'importe quel chercheur de la Source. Je la "traduis" ainsi, dans des mots d'aujourd'hui :

    ‹ Notre Père invisible - ou Toi le Vivant qui nous précèdes et nous désires,
    que ton Nom ne soit jamais réduit à une quelconque réalité terrestre,
    que ton Énergie vienne mettre en lien tous les vivants,
    que ton Désir se concrétise dans notre réalité comme dans le Réel invisible !

      Donne-nous aujourd'hui notre nourriture essentielle !
    Laisse aller nos torts comme nous laissons aller ceux qui nous ont fait du tort !
    Ne nous laisse pas engloutis dans la tentation du Même mais libère-nous des forces du mal

    car de Toi seul viennent l'Énergie des vivants, la Force libératrice et l'Intensité de l'être ! ›

      A-t-on seulement pris la mesure du fait que le nom de Jésus n'est pas même mentionné dans le "Notre Père", cette unique prière que les chrétiens de la première Église allaient adopter un peu comme leur carte d'identité ? Que peut-on comprendre par là ?
         Que jamais le nom de Jésus n'aurait dû, ne devait devenir pomme de discorde entre les humains (encore moins entre les chrétiens). Qu'avec une telle prière il y a de la place pour toute personne assoiffée d'Absolu. Qu'il est temps de reconnaître l'universalité de ce qui est dit là ! Que le clivage n'est sans doute pas entre croyants et non-croyants, chrétiens et non-chrétiens, mais bien plutôt entre ceux qui se laissent "atteindre" par le Réel sous l'évidence des faits observables, et ceux qui ne se laissent pas "atteindre". [...]
         [...] Personnellement, quand le Réel m'atteint, je suis prise à l'improviste ; à tous les coups je ne m'y attendais pas. [...] Quand je raconte ce genre d'expérience, je dis volontiers : "C'était fulgurant". Parce que cela ne venait ni de ma volonté, ni de ma réflexion, ni de mon imagination... »

    Lytta Basset, "la Source que je cherche",
    éd. Albin Michel 
    p 152-154 avec quelques coupures

     

        Il est important de retenir que ce qui surgit, le "Souffle de l'Esprit", est aussi le "tout autre" c'est-à-dire ce qui nous arrache totalement à l'auto-complaisance (qu'elle nomme "la tentation du Même").

        Plus encore que Jean-Yves Leloup, elle ouvre vraiment la voie à une rencontre parfaite entre les courants spirituels de toutes origines pour les faire se rencontrer à leur sommet, qui est en réalité leur origine commune, loin de tout enseignement et de toute tradition codifiée : le ressenti ; l'expérience.

     

     


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    Paroles de Mooji

     

     

    Sans la lumière du soleil,
    Rien ne peut être vu.
    La lumière est le plus grand sculpteur.
    Elle révèle les formes de toutes choses.
    Salutations au soleil.

    Sans la lumière de la conscience,
    ni le soleil ni sa lumière
    ni rien d'autre ne peut être vu.
    Salutations à la conscience.

    Sans toi, où est le monde ?
    Sans toi, qu'est-ce qui percevrait
    le jeu de l'existence ?
    Dans le satsang, on te conduit encore et encore
    vers la conscience, qui est ta propre lumière.
    Tu viens à redécouvrir que
    la conscience elle-même est la source
    de toute manifestation et que sans elle,
    rien ne peut être perçu comme existant.
    Tu es à la fois la conscience et simultanément
    celui qui perçoit la conscience en action.
    Te rends-tu compte de cela ?
    Sans toi qui perçois la conscience,
    ni la conscience ni son contenu n'existent.
    L'univers est... parce que tu es.
     
    ~ Mooji
    (facebook, publication du 15 mars 23)
     
     
     

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