• Une lecture intéressante

     


              Désireuse de renouer avec la médiathèque de la ville, je suis allée questionner la bibliothécaire sur de bons livres évoquant le voyage, la découverte, ou peut-être l'évolution personnelle (pour ne pas dire spirituelle).

             Celle-ci s'est aussitôt précipitée vers les livres de Laurent Gounelle - que je ne connaissais pas du tout -, et m'a exhibé celui-ci, paru en 2016 aux éditions Kéro :

     

    Une lecture intéressante


               J'ai commencé par reculer devant un titre aussi accrocheur et, il faut bien le dire, un peu éculé... me semblait-il. Mais elle a insisté fortement, m'invitant à lire la 4e de couverture. Toujours un peu précipitée, comme  à mon habitude, j'ai aperçu le mot hindouisme et me suis mis dans la tête que l'ouvrage relatait un voyage en Inde, ce qui m'a conduite à l'emprunter malgré mes réticences. J'ai une fâcheuse tendance à m'imaginer que l'on ne peut plus rien m'enseigner et que je risque même de m'ennuyer de ces rabâchages, mais par contre je rêvais encore de rencontres réelles avec des "maîtres vivants" (qui seraient comme on le croit souvent, en Inde).

             Cela n'a pas été du tout le cas. De plus il n'y avait dans ce roman aucun voyage, si ce n'est une évolution intérieure. Je n'ai pu que m'extasier sur l'habileté avec laquelle l'auteur réussissait à jeter son héroïne, athée à l'origine mais désireuse d'aider un ami prêtre dont l'église était désertée à remotiver ses paroissiens, dans une recherche active de sens dans la lecture des Évangiles, puis dans une mise en pratique directe des enseignements de Jésus ! Jusqu'à ce qu'à force d'épisodes inattendus et parfois humoristiques  elle finisse par apprendre que cet enseignement présentait d'étonnantes ressemblances avec celui de Lao Tseu dans le Tao Te King, et donc aille interroger un spécialiste des religions orientales qui lui donnera des précisions sur notre vraie nature masquée par l'ego, puis un astrophysicien qui lui expliquera la formation de l'Univers puis de la Vie, laissant finalement sous-entendre que cela ne pouvait être le fruit du hasard...

             Ainsi, le prénom qu'il lui donne, Alice ne semble finalement pas être anodin car elle pénètre bel et bien dans le monde de l'émerveillement.

           À aucun moment on ne s'enferre dans de la métaphysique complexe, tout est toujours fluide et semble couler sans problème au fil d'une histoire, si ce n'est que parfois on peut être surpris de voir dans une église des gens se prêter à des exercices d'introspection menés deux par deux comme dans les groupes de développement personnel, ou un prêtre donner pour pénitence lors d'une confession de méditer sur quelques questions-clés... Mais au bout du compte l'église finit vraiment par se remplir tant le travail proposé fait de bien, sans toutefois jamais cesser de demeurer centré sur les véritables paroles de Jésus  - à cela près que le jeune aumônier y inclut (comme l'a fait Jean-Yves Leloup, enseignant de la même veine) l'Évangile de Thomas.

           Pour rester dans la logique parfaite, l'auteur termine bien sûr en montrant notre jeune prêtre, quoique adoré et regretté par ses paroissiens, muté au Cameroun par décision brutale de l'évêque local lui-même instamment poussé par son entourage. Cela dérangeait trop.

           Ce que j'ai trouvé extraordinaire dans ce livre, c'est que l'auteur sache nous faire toucher du doigt, à travers l'expérience même des personnages, la nature de l'ego et la nécessité de le dépasser pour comprendre et ressentir ce que nous sommes vraiment : de la poussière d'étoiles... une vague de l'Océan Divin.

           Il montre même comment le dépasser cet ego, sans toutefois le brusquer car c'est une construction fragile fondée sur notre besoin de sécurité, qu'il importe de ne pas heurter sous peine d'en décupler la puissance et de l'enraciner dans l'inconscient jusqu'à le rendre incontrôlable. Non, le véritable moyen de dépasser l'ego dit Alice, et désigné par Jésus lui-même, c'est l'Amour ; l'amour vrai, profond, mène au-delà de l'ego.

           Autre chose encore m'a plu dans ce livre, sur un tout autre plan. Les cantiques habituels n'enthousiasment pas notre héroïne, et elle pousse son ami à les remplacer par une écoute de Jean-Sébastien Bach : « Bach, affirme-t-elle, ça rendrait croyant le plus matérialiste des athées, le plus marxiste des communistes ! ». Or je connais pour ma part plusieurs personnes qui, ayant déserté les églises, ont gardé une foi brûlante grâce à Bach. « Ce qui compte, ajoute-t-elle, c'est que ça te transporte dans un autre monde, dans une autre réalité... [...] Quand tu écoutes ça, tu as l'impression de te connecter... à la création de l'univers ! ». Elle évoque le choral "Jésus, que ma joie demeure", mais en ce qui me concerne je penserais plutôt au premier chœur de la Passion selon Saint Jean pour correspondre à une telle comparaison1.

     

            Eh oui, c'était vraiment une belle lecture.

     


     

    1 Je pense pour cela à une version ancienne avec un orchestre et des chœurs plus étoffés, car malheureusement la mode actuelle tend à pervertir Bach, dont on connaît pourtant la puissance à travers ses œuvres d'orgue, en l'interprétant de manière soit agitée et trop rapide, soit édulcorée en mode "menuet".

     

     

        

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  • Commentaires

    1
    Jeudi 14 Décembre 2023 à 15:19
    daniel

    Je ressens que ce livre t'a beaucoup intéressé. Depuis un certain temps je me dis que je devrais lire un livre de Luarent Gounelle! Il a raison: ne pas trop brusquer l'ego.....Sans doute faut-il prendre simplement conscience du rôle important que joue l'ego!

    2
    Jeudi 14 Décembre 2023 à 17:15

    Merci de partager ton plaisir de lecture.

    Belle soirée

    Bises

    3
    Vendredi 15 Décembre 2023 à 11:19

    Oui c'est une belle lecture

    J'aime beaucoup les livres de Laurent Gounelle

    Merci pour ton partage de lecture

    Bisous ma chère Martine et bon vendredi

    4
    Vendredi 15 Décembre 2023 à 19:00
    Merci pour ton ressenti de ce livre. Il existe des prêtres comme le père Matthieu de Joigny dans l'yonne qui vivifie notre église. J'ai déjà lu cet auteur mais il y a un moment. Olivier a reçu un des derniers sortis en poche. Je le lirai après. Bises
    5
    Samedi 16 Décembre 2023 à 16:38

    Alors, vivent les médiathèques et les bibliothécaires !

     

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