• Aussitôt que la vie... de Marie Gillet

     

     

    Aussitôt que la vie... de Marie Gillet

     

     

              De Marie Gillet, je n'avais lu jusqu'à présent que ses "Bonheurs du Jour"... Par contre, je les connaissais depuis longtemps et m'en étais déjà acheté deux ouvrages couvrant tous les jours d'une année, car elle en a publié plusieurs qu'elle ne mentionne pas dans ses "autres publications".

             J'ai penché pour ce tout dernier livre  parce que j'aime infiniment les promenades, et rêve depuis longtemps de marcher dans ce beau pays que je ne connais pas, le Massif de l'Estérel.

              Mais les promenades de Marie, si elles lui sont l'occasion d'établir des listes de mots à utiliser pour de prochains écrits, deviennent vite, en ce mois de février, le support de l'émergence de souvenirs, gais ou tristes en fonction de l'atmosphère du jour ou du paysage traversé. Sans apitoiement sur elle-même, elle montre la petite fille qu'elle fut, entraînée en pleine nature par un père solitaire, colérique et dépressif qui, sans jamais lui accorder un regard ni même lui parler, lui a quand même transmis ce grand amour des arbres et des violettes ... Puis, au gré de noms jetés au hasard rappelant des visages amis, elle nous montre sa joie incommensurable quand une femme de la région de Toulon, la prenant en affection après avoir accepté de la garder, lui apporte enfin l'amour d'une mère qu'elle n'a jamais connue, et lui offre une vraie vie de famille ! De tout cela, ces bois et ces collines environnantes ont été les témoins et ils le lui rappellent à chacune de ses visites.

             Elle marche avec bonheur dans ces lieux ressourçants et boit la lumière qui tombe d'un ciel inaltérablement bleu, la douceur émanée de plantes courageusement resurgies après un incendie, l'étincellement de la mer qu'on aperçoit au loin. Elle note toujours les mots nouveaux, étranges, colorés, du vocabulaire de la botanique et s'en enivre comme, petite, elle s'enivrait des couleurs qu'elle donnait à ses peintures - la seule occupation silencieuse que son père lui autorisait - , jusqu'à se demander si elle pourrait "écrire comme Pissarro peint", ou "comme Cézanne peint".

              Mais au cours du livre les souvenirs se précisent et l'émotion grandit dans le cœur du lecteur... C'est à peine si elle évoque d'innombrables séjours en hôpital, entre la vie et la mort. Fut-elle tentée par le suicide, malgré tout l'amour de la bonne Mètou et des siens ? Ou simplement fut-elle submergée de maladies éprouvantes, surgies d'un inconscient déchiré ? En effet, en elle il y a cette béance du "pourquoi" qui ne connut jamais de réponse : qu'était devenue sa mère ? Pourquoi son père n'accepta-t-il jamais de lui parler pour le lui expliquer, demeurant jusqu'à la fin plongé dans un mutisme farouche et ombrageux, se déchaînant en violentes colères à chaque tentative d'approche ? 

             Avec le temps, elle a su faire une croix sur cette blessure terrible, et affirme-t-elle, c'est la nature qui l'y a aidée. Ce sont ces magnifiques collines, et puis aussi cette grotte de la Sainte Baume dont l'approche lui rappelle sa forêt natale, près de Vincennes, et où le calme, le rayonnement spirituel y baignant lui apportent réconfort et soutien.

              Son livre, c'est comme une action de grâce à ce monde lumineux dont elle sent que, comme Ulysse après son voyage aux Enfers, elle doit d'être à nouveau en vie.

     

      

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  • Commentaires

    1
    Vendredi 6 Mai 2022 à 19:14

    Ce beau billet exprime bien le ressenti d'une lecture, qui peut différer d'une personne à l'autre et aussi en fonction de son propre état d'esprit. Il y a sans doute une grande blessure, comme tu l'écris, derrière cette reconstruction de soi dont témoigne ce livre. La nature apaise et ressource, à condition d'accueillir ce qu'elle nous offre.

     

      • Vendredi 6 Mai 2022 à 20:45

        Merci, Tania. Oui, c'est la richesse de ce livre aussi, d'offrir plusieurs lectures, l'une de surface et l'autre d'arrière-plan.

    2
    Samedi 7 Mai 2022 à 11:02

    Un beau ressenti de la lecture de ce livre qui doit émouvoir...

    La nature nous apaise.

    Bisous et bon samedi

    3
    Lundi 9 Mai 2022 à 10:19
    daniel

    Je vais régulièrement sur son blog. Ton texte me permet de mieux comprendre qui est Marie......Pas une vie facile !

    4
    Lundi 9 Mai 2022 à 10:27
    Quel bel hommage ! C'est un livre poème. Bises
    5
    Lundi 9 Mai 2022 à 11:19

    Bonjour Mâyâlilâ

    Tu donnes envie de lire cette vie de Marie Gillet.

    Quand il n'y a pas de réponse aux questions posées il est parfois difficile d'avancer. La nature les grands arbres les couleurs les fleurs peuvent apaiser mais ne répondent pas non plus.

    Merci de ce bel article

    Bises

    6
    Mercredi 11 Mai 2022 à 20:03

    je suis entrain de lire ce livre qui me touche beaucoup;

    bonne soirée mayalila

    7
    Den
    Jeudi 12 Mai 2022 à 09:31

    Merci de si bien parler de ce livre, si fort en mots, en ressentis. Il permet d'un peu mieux décrypter son auteure, Marie Gillet dont la vie n'a pas toujours été facile. La nature de ce beau coin de Provence, si colorée, si odoriférante a guéri ses blessures, Une délicate mousseline qui panse. Un apaisement parmi les fleurs et les arbres.

    Merci.

    Douce journée.

    8
    Samedi 14 Mai 2022 à 16:03

    Un petit coucou du samedi

    Merci pour tes gentils commentaires.

    Passe un bon WE Martine

    Bisous

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