• Variation autour d'une fable bien d'actualité

     

             Les circonstances actuelles me rappellent invariablement cette magnifique Fable de notre Jean de La Fontaine : "Les animaux malades de la peste", heureusement pas avec les mêmes conclusions (enfin, j'espère !). En voici le début.

     

    « Un mal qui répand la terreur,
    Mal que le Ciel en sa fureur
    Inventa pour punir les crimes de la terre,
    La Peste (puisqu'il faut l'appeler par son nom)
    Capable d'enrichir en un jour l'Achéron,
    Faisait aux animaux la guerre.
    Ils ne mouraient pas tous, mais tous étaient frappés ... »

    (Voir ici)

     
          L'horreur dans la pensée du fabuliste consiste dans le fait que les victimes se cherchent un "bouc émissaire" (ici le pauvre "baudet", si doux et innocent...); mais il est vrai que si de notre côté nous cherchions activement le "patient zéro", c'était surtout pour savoir où et comment il avait attrapé le virus afin de pouvoir combattre celui-ci : il y a donc moins d'obscurantisme religieux dans notre conscience contemporaine.

            Cependant la terreur semble rester vraiment le point commun entre notre expérience du covid 19 et celle de ces animaux : quand je vois qu'ici, en plein cœur d'un Berry encore intouché par ces symptômes, les pharmacies sont déjà dévalisées de masques et de gel hydroalcoolique, les rayons des supermarchés vidés de leurs épices, et que bien des gens se reculent en refusant d'être embrassés ou de serrer des mains !

            Prudence, dit-on ; prévoyance... Bien sûr il y a des caractères particulièrement à l'affût de se protéger, d'élaborer des réserves : mais savent-ils si elles vont leur servir ? S'ils ne vont pas en priver d'autres ? Pire : le gel hydroalcoolique mis à la disposition des patients se présentant aux urgences hier matin a été aussitôt volé ! Pour servir à qui ? Alors que s'il était nécessaire quelque part, c'était certainement aux urgences !

            C'est là que nous découvrons la sottise du mental humain. Le mental est un singe qui imite, mais toujours à contretemps. Il voit un problème arriver à quelqu'un, il se précipite pour s'en protéger : mais c'est trop tard ! Ce qui est arrivé à l'autre ne lui arrivera jamais. Comment pouvons-nous prétendre diriger notre vie mieux que Dieu ? (Ou "la Vie", comme vous voudrez l'appeler). Rien ne peut empêcher la Vie de vous offrir les épreuves qu'elle souhaite. Si vous réchappez d'une guerre, d'un accident ou d'une épidémie, c'est que vous deviez en réchapper. Mais si vous devez être frappé, aucune de vos petites combines ne pourra l'empêcher. Avez-vous programmé votre naissance ? Vos parents ? Certains se plaisent à l'imaginer ; mais dans ce cas, ils se haussent au-dessus de cette existence et se croient déjà au-delà de la mort. Cependant, en tant que créatures, nous n'avons d'action sur aucune des circonstances de notre existence, et encore moins sur notre mort. Nous nous soignons, faisons de notre mieux, par la Grâce de Celui (Dieu, ou Celle, La Vie) qui nous porte.

          Mais nous sommes portés. Nous sommes comme des nourrissons, comme des feuilles mortes sur l'eau : portés, conduits. Rien de plus. Alors soyons méfiants, armons-nous jusqu'aux dents : ce ne sera qu'un jeu, peut-être une cuirasse que la Vie elle-même nous aura suggéré d'endosser, qui sait ? Mais ne soyons sûrs de rien, ne soyons terrifiés par rien : tout arrive par volonté propre indépendamment de nous.

           Lorsque, comme le recommande Ramana Maharshi, nous acceptons de "lâcher nos bagages" et de nous asseoir paisiblement pour laisser aller le train jusqu'à sa destination ignorée de nous, alors vient la Joie, le bonheur d'être là, d'exister, de goûter cette vie si fabuleuse... Jésus disait de même :

    « La vie n'est-elle pas plus que la nourriture, et le corps plus que le vêtement ? Regardez les oiseaux du ciel : ils ne sèment ni ne moissonnent ni ne recueillent en des greniers, et votre Père céleste les nourrit ! (...) Observez les lis des champs, comme ils poussent : ils ne peinent ni ne filent. Or je vous dis que Salomon lui-même, dans toute sa gloire, n'a pas été vêtu comme l'un d'eux. »

    (Évangile de Matthieu, chap.6, 25-29)

     

      

    Lotus

     

     

    « LumièreConversion »

  • Commentaires

    1
    Mercredi 11 Mars 2020 à 18:39

    allons dans le bon sens .

    Merci pour ton article Mâyâlîlâ 

      • Mercredi 11 Mars 2020 à 18:51

        wink2 comme tu sais le faire, toi qui es sage...

    2
    Mercredi 11 Mars 2020 à 21:01
    Durgalola
    C'est un excellent texte (pour moi).
    Que ce soit la fable (salopards qui font le Haro sur l'âne ) . Ce soir ma prof de yoga a un peu craint en sachant que moi et une autre élève avions été malade. Heureusement elle a retrouvé son sang froid durant le cours
      • Mercredi 11 Mars 2020 à 21:36
        Je me disais bien pourtant aussi en regardant le journal de ce soir que rester vigilant est nécessaire pour éviter de contaminer autrui (ce que font les professionnels de santé). Cependant la suite m'a montré que mon développement était juste puisque sur France 2 on a vu une dame du Morbihan qui venait juste de guérir mais que pourtant on n'avait pas diagnostiquée comme porteuse du virus initialement. Donc les efforts pour se protéger n'auraient dans son cas servi à rien. De plus elle semble avoir guéri spontanément.
    3
    Mercredi 11 Mars 2020 à 21:02
    Durgalola
    Le coronavirus nous montre comment un élément invisible fait basculer les certitudes du monde. Bises
      • Mercredi 11 Mars 2020 à 21:39
        Exactement. Cela fait partie de ces grandes épreuves dont le but est de nous rappeler que nous ne sommes pas grand chose sauf dans notre dévouement pour autrui.
    4
    Jeudi 12 Mars 2020 à 09:42
    daniel

    Je suis tout à fait d'accord avec ton texte. Relativisons sans nous affoler !!

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