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         Suite à la découverte exposée dans l'article du 18 août (La Vérité cachée) je me suis procuré l'ouvrage cité d'Henry Corbin, qui est il faut bien le dire un pavé philosophique assez impressionnant, mais qui offre ce merveilleux cadeau de développer en détail l'univers mystique du soufisme le plus élevé (celui qui inspira les troubadours, Dante Alighieri, rejoint Platon et éclaire la fin du second Faust de Goethe...), tout en fournissant le texte précis mentionné dans la vidéo.

     

    L'imagination créatrice dans le soufisme d'Ibn' Arabi

     

             Au fil des pages émaillées de néologismes ayant pour but d'approcher au mieux le sens des concepts énoncés en persan ancien, on se laisse captiver par cette proximité du Dieu "caché en nous" et auquel nous sommes inévitablement rappelés par Sa puissance d'Amour, par la véhémence de son appel.

             En voici un extrait, au début du chapitre premier de la seconde partie, qui s'intitule :

    « De la Création comme théophanie »


      «  Il est nécessaire avant tout, de nous remémorer les actes de la cosmogonie éternelle conçue par le génie d'Ibn 'Arabi. Un Être Divin esseulé en son essence inconditionnée, dont nous ne connaissons qu'une chose : précisément la tristesse de cette solitude primordiale, qui le fait aspirer à se révéler dans les êtres qui le manifestent à lui-même pour autant qu'il se manifeste à eux. C'est cette Révélation que nous percevons ; c'est elle qu'il nous faut méditer pour connaître qui* nous sommes. Le leitmotiv* énonce non pas la fulguration d'une Omnipotence autarcique, mais une nostalgie foncière : 

        "J'étais un Trésor caché, j'ai aimé à être connu. C'est pourquoi j'ai produit les créatures afin de me connaître en elles." **
        Cette phrase est représentée comme la tristesse des Noms divins*** s'angoissant dans l'inconnaissance, parce que personne ne les nomme, et c'est cette tristesse que vient détendre cette Spiration divine (tanaffos)* qui est Compatissance (Rahma)* et existentiation**** (îjâd)*, et qui dans le monde du Mystère est Compassion de l'Être Divin avec et pour soi-même, c'est-à-dire pour ses propres Noms. Ou encore, origine et principe sont une  détermination de l'amour, lequel comporte mouvement d'ardent désir (harakat shawqîya)* chez celui qui est épris. À cet ardent désir, le Soupir divin apporte sa détente. »

    H. Corbin, L'imagination créatrice dans le soufisme d'Ibn 'Arabi, p.199

     

    *   (en italique dans le texte)
    **  (mis en relief par mes soins)
    *** (infiniment varié, Dieu est porteur de Noms innombrables dont les êtres vivants sont les représentants)
    ****(C'est le Souffle d'Amour qui amène à l'existence les êtres projetés à partir de leurs Noms).

     

        S'il n'y a que Lui se mirant Soi-même, se projetant Soi-même, alors qui sommes-nous ? Il est vrai que Jésus a su habilement présenter sa condition comme celle d'un Fils par rapport à un Père, Fils projeté par le Souffle (= Esprit Saint) de ce dernier. Mais il est étonnant de constater aussi combien Henry Corbin évoque fréquemment le bouddhisme ZEN comme étant très proche des conclusions d'Ibn 'Arabi, même si les apparences sont contraires. Le Zen ne nomme pas Dieu, car Il est innommable. Cependant la Réalité est une et indivisible ; seules en varient les approches humaines.

     


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        Hier soir, alors que je relisais quelques extraits de l'Asthâvakra-Gîtâ (perle du Védanta, ici traduite et présentée par Jacques Vigne aux éditions de l'Originel), je me suis arrêtée sur ce verset qui m'a frappée :

    « Celui qui n'est plus du monde n'est nulle part dans la réjouissance ou dans la dépression. Il garde constamment l'esprit frais, et il resplendit de façon royale, comme s'il n'avait plus de corps. »

    (chap.18, verset 22)


           En effet il m'a rappelé vivement ce souvenir musical que vous trouverez ci-dessous, et qui est une citation de Jésus dans l'Évangile de Matthieu :

     

    « Alors les justes resplendiront comme le soleil dans le Royaume de leur Père. Entende, qui a des oreilles ! »

    (chap.13 verset 43)


          Le Royaume dont il s'agit est ici présent mais invisible pour les yeux profanes. Il n'est accessible qu'aux "justes", c'est à dire à ceux qui ont su voir qu'ils n'étaient pas réellement du monde. De même, les oreilles qui servent ici à entendre ne font pas partie des sens humains, mais nous les possédons tous, c'est pourquoi Jésus nous exhorte à les utiliser.

            Le chemin pour s'affranchir de la fascination exercée sur nous par le monde est ardu, certes, mais une fois cette fascination dépassée, l'on s'aperçoit que tout est ce Royaume sublime dans lequel tout resplendit.

          Dans cet extrait du Elias de Mendelssohn (je reviens à mes anciennes amours !), le "alors" et le futur de "resplendiront" correspondent au moment, pour l'individu, de la Réalisation (ou Résurrection) ; mais en fait tout est déjà là, ici et maintenant.

     

     

     

     

     


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        Où règne le Printemps, ce Seigneur de Saisons, une musique mystérieuse se fait entendre.

         Là des torrents de lumière coulent en tous sens.

         Peu d'hommes peuvent atteindre à ce rivage.

         Où des millions de Krishna se tiennent les mains croisées ;

         Où des millions de Vishnu sont prosternés ;

         Où des millions de Brahmanes lisent les Védas ;

         Où des millions de Shiva sont perdus dans la contemplation ;

         Là des millions d'Indra et d'innombrables demi-dieux ont le ciel pour demeure.

          Là des millions de Saraswatis, déesses de  la musique, jouent sur la Vina.

          Là mon Seigneur se révèle à Lui-même et le parfum du santal et des fleurs flotte dans les profondeurs de l'espace.

     

    Kabîr, La Flûte de l'Infini, XV

     


          Les poèmes de Kabîr nous mènent au lieu le plus sacré de nous-même : dans ces profondeurs de notre cœur, où même les dieux auxquels nous avons pu croire sont dépassés. Quand nous plongeons au plus profond de la méditation, s'ouvre un univers illimité dans lequel tout prend naissance, à partir duquel tout apparaît - même nous-même.

             Pour celui qui a réussi à remonter ainsi à sa propre Source, le monde n'est plus qu'une danse extatique... Car, comme l'exprime magiquement la dernière phrase, il n'est plus que la révélation de l'Esprit à Soi-même.

     

     


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           Vendredi 10 vers 20 heures a lieu une Pleine Lune importante, car outre qu'elle est accompagnée d'une éclipse (ce qui veut dire que notre chemin de développement s'aligne sur son énergie, car elle est conjointe à l'Axe du Dragon, ou des Nœuds lunaires), elle se situe également sur cette puissante conjonction Saturne-Pluton en Capricorne qui nous remue depuis longtemps en nous incitant à travailler sur nous en profondeur afin de tout réaménager dans notre existence... ou presque (et cela également au plan collectif !). 

        À ce sujet, je vous invite si vous êtes intéressés à suivre la vidéo publiée par Émilie Charton, qui en présente bien la problématique.    

         Cependant ce n'est pas mon propos mais juste la pose d'un décor, destiné à montrer que Celui vers qui nous tendons, que nous cherchons, va peut-être s'exprimer davantage, se donner davantage à connaître dans ces moments de forte intensité émotionnelle.

        Or justement, voici deux "Maîtres" dont la Parole m'a vivement frappée hier. 

          Tout d'abord, j'ai rouvert le livre des poèmes de Kabîr,
    et me suis arrêtée sur celui-ci :

     

        Dans le vase terrestre sont des berceaux de verdure et des bocages ; en lui est le Créateur.

         Dans ce vase sont les sept Océans et les innombrables étoiles.

         Le joaillier et sa pierre de touche sont dedans.

         La voix de l'Éternel y retentit et fait jaillir le printemps.

         Kabîr dit : « Écoute-moi, mon ami ; mon Seigneur bien-aimé est dans ce vase. »

    Kabîr, La Flûte de l'Infini, Gallimard-Poésie
    poème n°VIII dans la traduction d'Henriette Mirabaud-Thorens

     

             Ce sont des paroles merveilleuses qui nous interpellent par leur douceur et nous obligent à réfléchir à leur sens, nous échappant au premier abord.

             Cependant après des années de réflexion, la surprise et l'émerveillement restent les mêmes, comme s'il s'agissait d'une lecture totalement nouvelle.

                Surtout si je les rapproche des mots de Mooji tout aussi merveilleux, diffusés avant-hier mais prononcés le 7 octobre lors d'une retraite silencieuse à Zmar au Portugal.

         (Je cite "à peu près" son traducteur ou sa traductrice, qui nous donnent à chaque fois la chance de comprendre clairement tout ce qu'il dit).

     

    «  Ce Silence que vous pouvez sentir est votre parfum. D'où vient-il, ce parfum, que personne ne peut toucher, mais que l'on peut seulement être ? Étrangement, vous êtes déjà cela, mais endormis à cela. (...)

        Il y a un dicton qui dit : "Tu veux goûter le miel, tu ne veux pas être le miel ; mais si tu goûtes le miel, tu es le miel aussi."

         Est-ce que je peux dire ça comme ça ? Tu te goûtes toi-même... Comment peux-tu te goûter toi-même ? C'est juste une manière de dire...  

       (...)

         Peut-être commencez-vous à compter à partir de 1. Pour moi c'est zéro, et je suis à la place du zéro... Heureux, ne construisant rien mais découvrant tout ce que le Père fait apparaître, j'expérimente ma chance : je ne suis rien, apparaissant comme quelque chose, et me réjouissant des deux. 

         ... C'est comme le Soi qui se contemple lui-même. C'est la plus belle des joies en fait... »

    Vidéo ci-dessous, entre 1h12 et 1h18 environ puis 1h26

     

     Surtout, ne manquez pas d'écouter la suite si le cœur vous en dit...

     

     

         

     


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          Voici des paroles qui pour moi reflètent la Vérité essentielle de toutes les religions, qu'il s'agisse d'Allah, de Yahveh, du Père, de Brahman ou du Grand Esprit.

            Elles sont mises dans la bouche de Krishna, qui ne s’exprime pas en tant qu'individu, mais en tant que la Puissance qui l'a mandaté, comme l'aurait fait Jésus ou tout Guide spirituel authentique. C'est pourquoi le terme "Moi" porte une majuscule.

           Les entendre élève l'âme et exalte l'amour qui gît au fond de notre cœur, ne demandant qu'à glorifier le Seigneur de l'Univers.

     

    « Celui qui sait jusqu'où s'étend l'ampleur de mon être et de ma puissance, celui-là est en mesure de s'unir à Moi. Or Je suis l'origine de tout et tout procède de Moi. Voilà ce que savent ceux qui en savent long, et ceux-là ne s'éloignent jamais de Moi.

    «  Ils sont portés au comble de la joie, ils reçoivent la plus belle part, ceux dont chaque pensée est en Moi, dont l'intelligence s'éveille par le saint compagnonnage, dont chaque parole tourne autour de Moi. Et ceux dont la discipline spirituelle est constante, ceux qui font de leur lien à Moi la source de toutes les joies ; à ceux-là J'offre la possibilité de me voir et de m'atteindre. Je demeure en eux, et par amour pour eux, Je disperse les ténèbres nées de leur ignorance avec la flamme du savoir. »

    La Bhagavad-Gîta, chapitre 10
    (Presses du Châtelet, traduction d'Alexis Lavis)

     

           Jésus ne prononce-t-il pas des paroles similaires dans l’Évangile de Jean ?

     

    «  Demeurez en moi, et je demeurerai en vous. Comme le sarment ne peut de lui-même porter du fruit, s'il ne demeure attaché au cep, ainsi vous ne le pouvez non plus, si vous ne demeurez en moi. »

    (Évangile de Jean, chap.15, verset 4)

     

         Il n'y a pas d'autre alternative que la pure dévotion et le don total de ses pensées et actions à Celui dont nous sommes issus.

     

     

    S'unir à Celui qui Est

     

     


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