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              Un jour le Maître t'a appelée.

             Oh ! Ce n'était pas la première fois ! 

             Il y a bien longtemps qu'il était là déjà comme un enfant blond, à te faire signe de le suivre... Tu l'avais fait, avec tes forces de l'époque, sans savoir ce qu'il était. Tu l'as appelé à ton tour, cherché... mais il avait déjà disparu. Et tu as pleuré, pleuré.

              Puis une main s'est tendue : tu étais sur le chemin.

             Alors tu as tout essayé, pour le retrouver. Et un jour, il a réapparu ! Plus proche, plus intime, plus insistant, t'offrant réconfort et guérison, et cette fois tu as su le reconnaître comme ton guide. Alors tu as couru derrière lui, couru, couru... C'était devenu un jeune homme, ou une jeune femme, tu ne savais pas ; mais ta vie s'en est trouvée enchantée. 

         Hélas, il t'a laissée de nouveau. Et tu n'as pu qu'admirer l'alpage frais et pur dans lequel il t'avait déposée, avec ses dernières recommandations. 

              Il fallait s'habituer à ces pauses ; les accepter. La Vie est faite pour être dégustée, appréciée. Quand on monte vers un sommet, cela commence par de la randonnée ; puis on s'élève jusqu'aux alpages, et là il est bon de faire halte avant l'ascension finale. Tu l'as compris ; mais comme il te tardait d'entamer la dernière étape !

            Et voilà qu'il t'a enfin de nouveau fait signe, tout proche cette fois, aussi totalement inattendu que parfaitement limpide... Immense comme la mer, vaste comme le soleil, tu l'as vu marcher devant toi comme un Roi, tantôt jeune homme, tantôt jeune femme, tantôt enfant ; tantôt souriant, tantôt distant, tantôt courroucé, changeant comme le ciel et comme les saisons. Et s'il t'a tenue par la main dans certaines passes difficiles, te communiquant sa force et te laissant inondée de gratitude, parfois aussi il t'a abandonnée à ton triste sort, ayant trébuché sur une pierre instable et déboulé dans un ravin. Sanglotant, tu as pansé tes blessures et tenté de nouveau l'escalade pour le retrouver, mais tu ne l'as plus aperçu...

          Seule te guidait sa lumière, mais était-ce la sienne ou celle de ta propre lampe ? Tu ne savais plus si tu le retrouverais, mais au moins tu savais qu'il te fallait monter ; et qu'est-ce que monter ? N'est-ce pas se libérer du connu, se libérer des attaches ? Et lui, n'était-il pas une attache ? Une idée ? Un projet ?

         La nuit est tombée. Le chemin est sous tes pas mais où est-il, ce guide suprême ? N'a-t-il pas été absorbé justement par cette Lumière qui émane de ton cœur ?

     

     

    Osho-Tarot Zen

     

     


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    Les nuages sont des anges

    Qui couvrent de leurs ailes bienfaisantes

    La terre accablée de soleil.

     

     

     

     


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    Conseils de sagesse pour aller de l'avant

     

         Pema Chödrön, née en Amérique en 1936 et devenue nonne bouddhiste après avoir été mariée deux fois et avoir élevé des enfants, auteure de nombreux livres de sagesse mais aussi d'un ouvrage qui s'intitule "Conseils d'une amie pour des temps difficiles", expose dans ce livre (paru initialement en anglais en 2015) tout ce que sa riche expérience et sa pratique spirituelle lui ont permis de comprendre au sujet de l'échec.

         1 - Qu'il fait partie de la vie et fait de nous des humains à part entière, nous interdisant donc de nous auto-flageller à chaque fois que cela nous arrive.

             2 - Que le ressentir pleinement est donc une occasion pour nous d'ouvrir notre cœur au-delà de l'ego, et de nous rapprocher davantage des autres.

     

              Ce livre, très agréable dans sa première partie (un discours à des étudiants) parce que très aéré et ponctué de belles calligraphies en forme de spirale ouverte, est suivi d'un long interview de la moniale, dont je vous cite ici les dernières pages, qui évoquent la perte de nos moyens physiques à travers la paraplégie, puis plus simplement la vieillesse (elle confie qu'à 79 ans elle ne peut plus rester 1/2h assise pour méditer ! Cela me rassure). Il faut dire qu'ayant été instruite par Chögyam Trungpa elle était à bonne école, celui-ci ayant vu tous ses projets s'écrouler à l'âge de 29 ans, quand un accident de voiture le rendit définitivement hémiplégique. 

            J'ai fait quelques coupures pour obtenir un extrait plus large sans qu'il soit trop long.

     

    «  Bien sûr, vous avez l'impression que quelque chose de terrible est arrivé quand vous vous réveillez après un accident et que vous êtes paralysé de la nuque aux orteils, par exemple. Je ne peux qu’imaginer l'épreuve à traverser. Mais au bout d'un moment, après avoir vécu une forme de processus de deuil et après vous être senti très misérable pendant quelque temps, vous pouvez finir par vous dire, tout simplement : "Je n'ai rien fait de mal. Ma nature véritable n'a pas été touchée par cet événement. Mon être profond est toujours le même qu'avant."

         Qu'il s'agisse d'une maladie mentale ou d'un handicap physique, cela n'a pas entamé votre nature profonde. Vous pouvez avoir confiance en elle et revenir à elle comme à une pierre de touche. Et donc votre pratique, encore et toujours, consiste à sentir ce que vous ressentez sans l'émergence du scénario que vous élaborez par-dessus, à rester avec ces sensations telles qu'elles sont, avec beaucoup de douceur et même de reconnaissance.

              (...)

            Cela ne veut pas dire se sentir bien ou se sentir mal, mais aller au-delà des étiquettes de bien et de mal. Vous pouvez sentir que votre nature véritable est vaste, ouverte, fraîche, impartiale, et non emprisonnée dans ces étiquettes que nous collons partout.

              Tout est dans notre état d'esprit quand il s'agit de vieillesse : tout considérer comme positif, comme une occasion d'aller de l'avant (...). Plutôt que de reculer pour chercher à vous réfugier dans ces petites îles de sécurité qui ne cessent de vous lâcher, vous apprenez à voler ou à flotter et à être en paix dans la non-forme, dans les moments où vous perdez pied, ou lorsque vous vous trouvez face à l'ouverture sans limite de ce qui est - tous ces états qui sont en fait ce que vous êtes vraiment depuis le début.

           Vous ne savez jamais vraiment ce qui va se passer ensuite, et vous ne savez jamais qui vous êtes, instant après instant. Tout se déroule instant après instant. Vous savez, pour moi à l'heure actuelle, c'est palpitant de voir comment tout continue de se dévoiler. Même l'ennui... »

    Pema Chödrön, une conversation avec Tami Simon

     

         Je n'avais pas pensé recopier cette dernière phrase, et maintenant je la trouve magique ! "C'est palpitant de voir comme tout continue de se dévoiler."

         La Vie : un dévoilement... Et c'est ce qui suscite l'émerveillement. Petit à petit, tout apparaît ; et nous savons que rien n'aurait jamais pu être changé à ce qui de toutes façons EST.

     

     

     


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             Étrangement, c'est peut-être le fait d'avancer en âge qui permet de découvrir peu à peu la Vérité.

           Ainsi, la Vie serait par essence le meilleur maître, et surtout dans son aspect temporel.

     
             En effet, quand on se voit reculer par rapport à tout ce qui a été vécu - enfants devenus adultes, petits-enfants qui grandissent à leur tour, chaque génération "chassant" l'autre comme les vagues se succèdent sur une plage -, et que l'on découvre que l'on n'a jamais changé, que l'on est toujours le même ; quand on regarde avec étonnement ces mains qui se rident alors qu'autrefois elles n'étaient pas ainsi, et ce visage si changé dans une glace... alors soudain on peut avoir l'impression d'être immobile au cœur d'une sorte d'immense nuage virtuel dans lequel tout est mouvant.

               Immobile en tant que simple présence consciente, qui constate que tout passe, et passe continûment. Les événements arrivent inopinément en tant qu'expériences, puis s'éloignent et ne sont plus que pensées (souvenirs, mémoires), comme les rêves. Le corps peut entamer des actions - on ne sait comment ni pourquoi les décisions sont prises, cela s'enchaîne par sa propre inertie, par un enchaînement de causes qui nous échappent -, on peut éprouver de la peine, de la fatigue, et puis l'on constate le travail terminé. Mais qui l'a fait, pourquoi, comment ? Finalement cela s'est simplement fait, cela s'est simplement produit, c'est tout.

          Les mains peuvent écrire, les yeux peuvent lire : qui les y a poussés, comment, pourquoi ? Il peut en découler une satisfaction, un enrichissement, c'est une des couleurs de la vie. Tout comme le fait d'entrer en relation avec autrui, quel que soit le type de la relation : l'échange procure de la joie, toute relation même pénible a pour fondement la joie de la rencontre, de la confrontation d'idées, de caractères, d'expériences, de pans de vie, d'états d'être.

            Qui suis-je, qui perçois tout cela, qui suis-je, pour voir se dérouler ces faits, ces pensées, ces mémoires ? Puis-je être trouvé, si le corps que je pense me définir s'avère lui-même aussi changeant que les saisons et donc totalement distinct de ma nature profonde ?

            Quand je regarde un arbre, je constate qu'il n'est constitué pour mon esprit que de mémoires : la forme, le mot "arbre" sont des concepts appris et ajoutés ; la notion de couleur "verte" est une convention mentale utilisée afin d'échanger, elle appartient au domaine verbal. Ce qui fait la nature même de l'arbre est pure sensation de l'instant.

          Il en est de même pour le corps que je crois habiter et qui, comme l'arbre, fonctionne de lui-même de façon pleinement autonome. Différents instincts lui ont été ajoutés pour le pousser à se nourrir, à prendre soin de lui-même, à éviter le danger, mais ils font partie du bagage apporté par la nature. Tout cela, je puis le constater pleinement en permanence.

            Il est notamment doté d'un intellect à double tranchant : car si celui-ci lui permet des opérations mentales particulièrement prodigieuses, il est aussi à l'origine de la confusion que nous entretenons à l'égard de nous-mêmes. Prétendant expliquer tout l'univers et même en corriger le fonctionnement, il se prend pour le maître du corps, puis pour l'origine des actions, puis pour le créateur des idées et finalement se croit tout-puissant ! 

           Pourtant, les grands scientifiques savent bien que notre savoir ne mène qu'à la certitude de notre ignorance, et que l'intellect ne sera jamais qu'un outil particulièrement perfectionné du corps humain, au même titre que la main mais à un niveau beaucoup plus subtil.

             Qui suis-je donc, qui découvre que l'intellect n'est que l'octave supérieur du mental, mais rien de plus qu'un outil dont je suis l'observateur amusé ? Comme le corps, il va s'user peu à peu, s'émousser, peut-être disparaître avec le vieillissement - tandis que ce que je suis, pourtant, demeure inchangé.


             Ce que je suis n'est ni cernable, ni discernable. Ce n'est ni observable - puisque c'est ce qui observe - ni localisable puisque cela semble englober le corps sans s'y trouver nulle part. À la rigueur, on peut l'imaginer au niveau du cœur, mais ce n'est pas de l'organe qu'il s'agit, c'est de la source de notre respiration au milieu de la poitrine.

                Et ce lieu invisible et incernable ne peut être atteint par aucune agression extérieure, puisque tout ce qui arrive n'arrive qu'au corps ou à ses attributs (mental, intellect) sans nous empêcher d'en rester le témoin immuable et détaché.

               Nous sommes donc dans une sorte d' "espace" hors temps et hors espace tangible, une demeure de paix où nous ramène la pratique de la méditation, lorsque justement nous nous appliquons à n'être plus qu'observateur de ce qui se produit dans notre esprit ou autour de nous.

              Finalement, tout se produit toujours "autour", en périphérie, comme si ce que  nous sommes était le centre de ce nuage mouvant que j'évoquais au début.

               Est-ce cela que nous appelions "moi" autrefois ? Certainement pas. Notre "je" habituel est, comme l'arbre, une série de concepts liés au corps, aux possessions et au caractère du corps, à l'histoire et à la culture emmagasinées par ce corps sous forme de mémoires. Mais maintenant que nous savons que cela est périssable et animé de sa vie propre, où nous situons-nous vraiment ? Nous que notre coeur pousse en avant à l'aveugle, mû principalement par l'amour ?


             Nous sommes une expression de Ce qui Est ; une expression de l'Amour, et rien d'autre.

                Et l'Amour nous relie, indéfectiblement ! Quels que soient les actes parfois aberrants du corps qui suit une voie dont les tenants et aboutissants nous échappent totalement...

             Être sans soi, c'est donc se laisser porter par les choses sans s'imaginer diriger quoi que ce soit. La Vie se vit d'elle-même, tout nous vient par inspiration de notre Source unique et suprême. 

     

     


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                La Vérité est au-delà de la pensée.

             Cependant, nous n'avons à notre disposition que la pensée, tant pour la chercher que pour l'exprimer.

              Aujourd'hui je m'émerveille de découvrir que, lorsque l'on cherche profondément une issue à la souffrance et que l'on s'oriente vers cette Vérité qu'on appelle de tant de noms différents (Dieu, Soi véritable, Félicité suprême, Nirvana...), elle finit par se découvrir d'elle-même et se manifester à travers le "Satguru", c'est à dire le guide authentique.

             Celui-ci peut tout d'abord prendre l'aspect d'un "maître" rencontré de façon inopinée ; mais l'on découvre bientôt que tous les maîtres sont faux, puisqu'ils apparaissent à travers un jeu de personnalités - un "je" personnel soumis donc à la pensée et aux concepts, et bien éloigné de cette Vérité au-delà des pensées.

            Le "faux maître" se transforme alors en Gardien du Seuil : il arbore tous nos démons, toutes nos peurs, toutes nos projections... mais qu'importent ses ruses, puisqu'il indique que nous sommes au seuil de la Découverte essentielle ! Si nous sommes perspicaces, il nous aide plutôt, par effet de miroir, à décrypter le fonctionnement de notre ego à travers son comportement et nos réactions.

           De même que, la terre étant ronde, un avion lancé vers l'ouest reviendra tôt ou tard à son point de départ par l'est ; de même que, l'Univers étant courbe, une énergie lancée à travers l'espace reviendra tôt ou tard sur elle-même ; de même, tout individu né sur cette terre, s'il fait le vœu ardent et résolu de revenir à sa Source, y reviendra tôt ou tard.

            C'est sûr et inévitable.

            Les voies sont multiples, aussi multiples que les formes de vie, les cultures et les caractères sur cette terre. Elles appartiennent toutes en propre à chacun d'entre nous ; elles sont notre cordon ombilical, notre reliance à l'Infini qui nous a enfantés.

            Mais souvent, très souvent, nous avons le besoin de ressentir que, de même qu'à notre naissance la nature nous a dotés de parents pour nous nourrir et nous guider, de même nous avons ce Satguru, figure à la fois de Mère et de Père, semblant agir tantôt comme Père et tantôt comme Mère (et que nous appelons comme nous voulons), qui nous soutient et nous guide infailliblement dans notre cheminement.

     
           À ce point de ma méditation, la musicienne que je suis ne peut éviter de se rappeler la merveilleuse fin des "Béatitudes" de César Franck, qu'aimait tant une vieille amie de mes parents, fille du compositeur Guy Ropartz (Gaud, qui est mentionnée dans l'article en lien).

           Le texte de Mme Colomb, autrefois décrié pour ses aspects emphatiques ayant entraîné de la part de Franck certains développements un peu lourds, est ici magnifique et la musique l'y rejoint pour une sublime apothéose, à travers l'amour vibrant qui se dégage des dernières paroles du Christ, notées ci-dessous.

             Dans cette 8e Béatitude qui évoque les "persécutés pour la justice" (d'après l'évangile de Matthieu, chap.5), la mère de Jésus vient d'apparaître pour rappeler ce qu'elle a souffert (ne l'appelle-t-on pas "Notre-Dame des Douleurs" ?), ce qui a définitivement brisé la morgue de Satan qui jusque là ne cessait de pousser le monde à la révolte et à la violence. Alors Jésus ouvre grand ses bras à ceux qu'il appelle "Les Bénis de mon Père" : ceux qui ont su aller jusqu'au sacrifice d'eux-mêmes pour faire régner la Justice - c'est-à-dire la Vérité et l'Amour.


            Jésus représente ici le Satguru qui guide immanquablement vers le but, "le Ciel", représentation de notre Demeure ultime où règne la Félicité, tandis que le "Père" qu'il évoque désigne l'Être Pur, la Source de tout. Quant à Satan, c'est une figure du mental perverti qui entraîne à la souffrance par les pièges de l'ego, et plus particulièrement ici le Gardien du seuil, image saisissante et abrupte de tous les pièges que nous devons affronter pour peu à peu nous extraire de l'erreur où nous étions plongés.

     

     

    JÉSUS

    Ô justes que mon Père envoie
    parmi les pervers,
    conservez une sainte joie
    au milieu des revers !
    Soyez heureux, quand au supplice
    vous êtes jetés !
    Heureux ceux qui pour la justice
    sont persécutés.
    Le Ciel souffre violence*, 
    bénis soient les vaillants, les forts,
    le Ciel sera la récompense
    de leurs saints efforts !

    SATAN

    Ô Christ, par toi je suis vaincu !


    JÉSUS

    Venez, venez !


    SATAN

    Mon règne a vécu...


    JÉSUS

    Venez, venez !
    Venez, les bénis de mon Père,
    venez, venez à moi !
    Vous avez, sur la terre,
    vous avez suivi ma loi !
    Venez, de la Gloire éternelle
    ma croix vous ouvre le chemin ;
    le chœur céleste vous appelle,
    les anges vous tendent la main !
    Venez, venez les bénis de mon Père,
    venez, venez à moi !
    Vous avez, sur la terre,
    vous avez suivi ma loi !

     

    * C'est ici à un passage assez obscur de l'évangile de Matthieu qu'il est fait référence (au chap.11 ; voir aussi en suivant le lien Luc 16,16

     

     


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